Élue meilleure chocolatière de France en 2016, Hasnaâ révolutionne l’univers du chocolat à Bordeaux

Article publié sur Actu.fr

En 2014, Hasnaâ Ferreira a ouvert sa première chocolaterie à Bordeaux (Gironde). Six ans plus tard, elle est devenue la référence des gourmands. Portrait d’une surdouée insatiable.

Hasnaâ Ferreira est à la tête d’une chocolaterie de 13 employés. (©Actu Bordeaux / Nicolas Gosselin)

Dimanche 20 décembre, dans sa chocolaterie située rue Fondaudège à Bordeaux (Gironde), Hasnaâ Ferreira et ses employés sont submergés de montagnes de chocolat à l’approche de Noël.about:blankhttps://acdn.adnxs.com/dmp/async_usersync.html

Durant le mois de décembre, elle estime qu’environ cinq tonnes de confiseries sortent de son atelier pour le plus grand plaisir des clients, toujours plus nombreux à pousser la porte de ses points de vente Hasnaâ Chocolats Grands Crus.

Des recettes qui cassent les codes

En un temps record, cette entrepreneuse de 37 ans a réussi à devenir incontournable dans l’univers du chocolat à Bordeaux, alors que des maisons comme Cadiot-Badie ou Saunion existent depuis près de deux siècles.

La recette de son succès ? « On ne propose pas du tout les mêmes produits qu’eux, répond Hasnaâ, à toute berzingue, son rythme de croisière en cette fin d’année. Je pars du principe qu’il y a de la place pour tout le monde. Donc on séduit une clientèle différente. (Elle cherche ses mots) Peut-être une clientèle peu plus jeune… Plus internationale aussi. »

Face aux recettes centenaires de ses principaux concurrents, la chocolatière prend le contre-pied. « Chez nous, la seule recette à laquelle sont habitués nos clients, c’est que nos produits changent tout le temps », ajoute-t-elle.

D’un côté donc, la madeleine de Proust, qu’on retrouve de génération en génération chez Cadiot-Badie ou Saunion. De l’autre, des saveurs plus surprenantes, sorties de l’imagination insatiable d’Hasnaâ, qui séduit les gourmets jusqu’au Japon.

De la coriandre, de l’anis ou du sésame dans ses chocolats

Elle s’inspire de ses origines marocaines – comme pour ses créations chocolatées avec de la coriandre ou l’anis -, de souvenirs, de voyages, d’échanges avec des amis ou des clients… L’un d’entre eux, par exemple, lui ramène des fois des agrumes de son jardin pour qu’elle fasse une création à partir de ça. Aussi, une fidèle lui réclame un chocolat à la cannelle.

La chocolatière est ouverte à tout. Elle ne veut pas faire de guignettes comme les chocolateries traditionnelles mais ses clients lui en réclament ? Ok, mais elle y ajoute son grain de sel ou plutôt du grué de cacao torréfié à la place des paillettes de chocolat. Un choix marqué, car fort en goût, mais 100% assumé.

Hasnaâ fait des guignettes à sa façon. (©Actu Bordeaux / Nicolas Gosselin)

Désignée meilleure chocolatière de France en 2016 par le Club des croqueurs de chocolat (l’équivalent du Guide Michelin pour la restauration) et coup de cœur du jury car élue à l’unanimité, elle ne cherche pourtant pas les titres. « Etre la meilleure ? Ça ne veut rien dire. C’est subjectif. J’estime que je ne le suis pas et je ne cherche pas à l’être. »

« Je ne cherche pas à faire plaisir à tout le monde. Je veux me faire plaisir à moi et trouver une clientèle qui me ressemble. » Hasnaâ Ferreira

Cette notion de plaisir, qu’on lit sur son large sourire quand elle fait des chocolats et qu’on savoure quand on les goûte, l’a amenée à créer sa chocolaterie en 2014 et a ouvert une première boutique au 192 rue Fondaudège ; une deuxième en 2016 rue de la Vieille Tour, en plein centre-ville, boostée par son succès ; et enfin, un bar à mousses au chocolat aux halles de Bacalan en 2018.

Ex-mannequin et vendeuse en bijouterie

En effet, cette maman de deux enfants a mis le temps avant de trouver sa voie professionnelle. Après un master de communication-marketing obtenu à Casablanca, dans son Maroc natal, elle a d’abord travaillé dans un centre d’appels.

Ensuite, elle a bossé dans une agence de publicité en tant que cadre, puis dans un groupe de presse en tant que chef de pub, avant d’atterrir dans une bijouterie où elle était représentante de la marque Rolex. Et en parallèle, elle faisait du mannequinat.

Arrivée en France en 2009, « pour raison familiale », elle enchaîne avec d’autres boulots où elle ne s’épanouit pas. À nouveau dans une bijouterie – Histoire d’Or – puis ensuite, dans une école privée de Bordeaux en tant qu’assistante de direction.

En 2012, la pétillante Hasnaâ veut fuir une existence professionnelle plate. « Je passais la journée à répondre à des mails, résume-t-elle. J’avais l’impression de perdre mon temps. Je me demandais où était ma valeur ajoutée. Je ressentais le besoin de créer, de produire, pour qu’à la fin de la journée, il reste quelque chose de concret de mon travail. »

Un passage à la télévision sur Masterchef

Elle pense à fleuriste, fromagère, restauratrice… D’ailleurs, l’ancienne mannequin s’inscrit à Masterchef – elle est retenue – et participe à l’émission culinaire télévisée. C’est décidé, elle veut quitter le secteur tertiaire et s’engager dans l’artisanat. La brune aux yeux cacao est naturellement attirée par le chocolat…

C’est une matière qui se transforme. Pour quelqu’un qui ne veut pas s’ennuyer, c’est la meilleure matière. On peut faire plein de choses avec le chocolat. Puis c’est universel. Qui n’aime pas le chocolat ? Hasnaâ Ferreira

Après l’expérience Masterchef, elle fait un stage chez Saunion, chocolatier emblématique de Bordeaux, et enchaîne avec une courte expérience professionnelle avant de filer à Rouen (Seine-Maritime) pour suivre une formation de six mois à l’Institut national de la boulangerie pâtisserie et valider un CAP.

Un atelier ouvert au public

Hasnaâ ouvre « La fèverie » au public depuis novembre 2018. Unique à Bordeaux, cet atelier a pour vocation de sélectionner des fèves rares à travers le monde, puis de les trier à la main, les torréfier, les concasser et enfin les concher pour créer des tablettes sensationnelles en édition limitée. Un savoir-faire précieux que les curieux sont invités à découvrir.

Les bases en poche, la Franco-Marocaine retourne à Bordeaux pour retrouver mari et enfants, puis pour poursuivre son apprentissage. En autodidacte. Elle tente de nouvelles créations, cherche de nouvelles idées, se perfectionne au fil de ses expériences. « Quand on arrête d’apprendre, on meurt », clame-t-elle comme une leçon de vie.

Des chocolats au vin du Médoc

Avec sa collection « Un instant à Bordeaux », la chocolatière démontre toute sa technicité et a même déposé un brevet après quatre ans de recherches et d’essais. Il s’agit de ganaches au vin réalisées à partir de grands crus de cinq terroirs viticoles du Médoc :

Margaux avec le vin du Château Marquis de Terme ; Moulis avec le vin du Château Poujeaux ; Saint Julien avec le vin du Château Léoville Poyferré ; Saint Estèphe avec le vin du Château Le Crock ; Pauillac avec le vin du Château Pédesclaux.

« Il m’a fallu du travail pour arriver à un résultat satisfaisant, précise-t-elle. C’est très compliqué avec le vin de réussir à ce que la recette reste stable dans le temps. Maintenant, c’est bon ! » Ils sont vendus aussi à la Cité du vin, pour les touristes.

Une ganache au sapin !

Épanouie dans son métier de chocolatière, Hasnaâ a trouvé sa vocation. En cette période de Noël, elle la vit à 200 à l’heure. « Surtout que cette année, le panier moyen est 30% supérieur aux autres années. Comme si, avec la Covid, les gens se sont lâchés », s’interroge-t-elle.

En 2020, l’artiste préférée des gourmands bordelais propose de nouvelles originalités : praliné graines de courges, praliné graines de maïs ou encore une ganache au miel de sapin et liqueur de bourgeon de sapin. Une idée de cadeau savoureuse à glisser sous…

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