Tasmanie : on a visité le Mona, le musée le plus extravagant d’Australie

Article publié sur geo.fr

En Australie, le vaisseau-amiral de l’art contemporain ne se trouve ni à Sydney ni à Melbourne, mais à Hobart, chef-lieu de l’île de la Tasmanie, au sud-est du pays. Musée faussement subversif ou follement captivant ? Suivez le guide.

Six mois par an, Tim Steiner se « loue » au Mona quelques heures par jour et expose son dos tatoué par le Belge Wim Delvoye.© Mona / Jesse Hunniford

Dans quel musée du monde des momies égyptiennes côtoient-elles les machines mi-insectes mi-tracteurs de Jean Tinguely et les installations flashy de James Turrell ? Pas au palais de Tokyo parisien ni au MoMA new-yorkais, mais au Mona de Hobart, Museum of old and new art, fondé en 2011 par le milliardaire tasmanien David Walsh, un crack des jeux d’argent (black jack et courses hippiques, notamment).

Quelque 400 000 visiteurs par an, dont trois quarts d’Australiens du continent, se rendent chaque année en Tasmanie sur les bords de la rivière Derwent, à Hobart (chef-lieu de l’île), pour visiter cette curieuse institution accessible en ferry et creusée à même la falaise. Claustrophobes s’abstenir. Le Mona, gigantesque grotte, est composé de trois niveaux sombres et souterrains, reliés entre eux par des escaliers en colimaçon et de labyrinthiques coursives en acier corten.

Nulle explication accolée aux œuvres, mais un boîtier de type « audioguide amélioré » délivre des fiches-légendes et suggère des morceaux de musique. Dans une salle déconseillée au moins de 15 ans, l’appareil lance Lay Lady Lay, de Bod Dylan. Là, entre la photo géante d’une rousse dévêtue (India Frost, par l’Américain Ryan McGinley) et des tableaux déroutants de l’Australien Sidney Nolan, une jeune femme se repose, emmitouflée dans ses bandelettes. Voici donc la momie de Ta-Sheret-Min, née entre 664 et 399 av. J.-C. Bien mieux conservée que son aîné Toutankhamon, elle crâne dans son sarcophage richement décoré (David Walsh a longtemps collectionné les antiquités avant de se tourner vers l’art contemporain).

Il a vendu son corps à un collectionneur

Un peu plus loin, un homme assis en tailleur trône immobile sur un piédestal. Prière de ne pas dépasser la ligne blanche, interdiction de toucher l’énergumène. Il respire, il est vivant. Six mois par an, Tim Steiner se loue au Mona quelques heures par jour et expose son dos tatoué par le Belge Wim Delvoye (une madone psychédélique surmontée d’une tête de mort). En 2008, il a vendu son corps au collectionneur allemand Rik Reinking (150 000 €), lequel pourra le dépecer tout son soûl quand l’heure de Tim sera venue. Mais l’œuvre la plus appréciée du public reste encore bit.fall : une cascade volubile qui, par un ingénieux système de valves signé Julius Popp, crache des mots en lettres d’eau : music, centre, dragons, birth, Australia, largest, winning, jetski...

« Il n’y a rien de semblable au Mona dans toute l’Australie, assure Joseph Gleeson, 38 ans, écrivain de Melbourne rencontré dans l’avion (comptez quelque 25 heures de vol depuis Paris pour rejoindre la Tasmanie). Je m’y rends à chaque fois que je vais sur l’île, une fois par an environ. On pourrait croire que ce genre de musée serait implanté à Sydney ou Brisbane, mais non ! C’est à Hobart. Ce que j’aime par-dessus tout, c’est le côté interactif. Tous vos sens sont sollicités. »

Tous, oui. L’une des pièces maîtresses n’est autre qu’une imposante machine à caca : un « cloaque professionnel » du même Belge Wim Delvoye. Lequel s’est appliqué à imiter l’intégralité du processus digestif humain, de l’ingestion d’aliments à la défécation. Odeurs comprises.

https://photo.geo.fr/tasmanie-visite-guidee-du-mona-le-musee-le-plus-fou-d-australie-35683

Infos pratiques à retrouver sur le site du Mona. Entrée gratuite si vous avez moins de 18 ans ou si vous résidez en Tasmanie. Si non, comptez environ 18€. Pour se rendre en Tasmanie : plus de précisions sur le site de l’office du tourisme d’Australie et sur Discover Tasmania, qui nous ont aidés à réaliser ce reportage.

Pour se rendre à Tasmanie, deux étapes : 1) trouver une compagnie qui desserve l’Australie, de préférence Melbourne ou Sydney (Etihad, qui nous a aimablement offert le vol, Singapore Airlines, classée meilleure compagnie aérienne par les internautes de Trip Advisor, Emirates…) 2) ̶N̶a̶g̶e̶r̶ ̶j̶u̶s̶q̶u̶’̶à̶ ̶H̶o̶b̶a̶r̶t̶ Prendre l’avion de Melbourne à Hobart, Launceston ou Devonport (avec Virgin Australia, par exemple) ou – pour les amoureux de la mer – sauter dans le ferry Spirit of Tasmania, entre Melbourne et Devonport.

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