Qu’est-ce que la raspoutitsa, ce phénomène climatique qui pourrait ralentir l’armée russe en Ukraine?

Article publié sur géo.fr

La “raspoutitsa” est un phénomène naturel dû au changement climatique. Elle pourrait avoir un rôle décisif dans l’invasion russe en Ukraine.

Il y a déjà eu beaucoup de situations dans lesquelles des chars russes et d’autres véhicules sont passés par les champs et ont été bloqués. Russian Defence Ministry – HANDOUT

La “raspoutitsa” va-t-elle gêner l’avancée des forces russes ? La réponse pourrait être positive, et la météo en est en partie responsable. La “raspoutitsa” est un phénomène naturel, que l’on traduit par la “saison des mauvaises routes”. Elle désigne la période de l’année lors de laquelle une importante partie des terrains plats se transforment en mer de boue à cause de la fonte des neiges. Généralement, elle apparaît à la deuxième quinzaine de mars. Sa durée peut varier entre deux et trois mois, en fonction de la quantité de neige stockée pendant l’hiver.

Rappels historiques : le dégel engendre une saison des boues (Raspoutitsa) qui dure 3-4 semaines, et remonte du Sud (Crimée) vers le Nord en qq jours jusqu’au Bélarus. En 1942, elle a débuté vers le 21/03 En 1943, le 18/03 En 1944, le 17/03 (Dates selon les KTB)

À la même période chaque année, cette “raspoutitsa” commence au Sud, avant de prendre la direction de la Crimée et de progresser vers le nord et de s’étendre de la Biélorussie à Kiev. “Il y a déjà eu beaucoup de situations dans lesquelles des chars russes et d’autres véhicules sont passés par les champs et ont été bloqués. Les soldats ont été obligés de les abandonner et de continuer à pied” affirme à l’AFP l’analyste militaire ukrainien Mykola Beleskov.

Déjà en 1812, les troupes de Napoléon en avaient fait la mauvaise expérience, et avaient été retardées lors de leur retraite de Russie. Sur le front est pendant la Deuxième Guerre mondiale, “si les grandes opérations mécanisées étaient presque complètement arrêtées pendant les grandes pluies d’automne ou lors des dégels du printemps à cause de la célèbre raspoutitsa, la boue des plaines russes, elles reprenaient en hiver, lorsque les sols avaient à nouveau durci”, étayait l’historien Laurent Henninger dans la revue Défense nationale en 2015.

“Les quatre cavaliers de l’armée ukrainienne : le Javelin, le Stinger, la raspoutitsa et TikTok”

“Le temps ne joue pas en faveur de Poutine” estimait dimanche sur Twitter l’historien militaire Cédric Mas. “Le début du printemps est un mauvais moment pour envahir l’Ukraine”, écrivait le professeur en stratégie de sécurité nationale Spencer Meredith. “Normalement, à la mi-février, les routes sont recouvertes de couches de glace et de neige compactes, qui fondent ensuite pour révéler un ‘champ de mines’ de nids-de-poule”, soulignait-il dans cet article publié à quelques jours du début de l’invasion par le Modern War Institute de la prestigieuse académie militaire américaine de West Point.

“Les quatre cavaliers de l’armée ukrainienne : le Javelin, le Stinger, la raspoutitsa et TikTok”, résume sur Twitter Jason Lyall, spécialiste de la violence politique dans les guerres civiles et conventionnelles et enseignant à l’université américaine de Dartmouth. Il fait référence ici aux lance-missiles antichars Javelin, aux missiles antiaériens Stinger.

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