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Suite au confinement longtemps imposé en Angleterre, John et Catherine Pawson ont fait de leur maison de campagne leur résidence principale. Dans ce lieu à la fois bucolique et radicalement minimal, ils se sont inventé un nouveau mode de vie, plus proche de la nature.

L’architecte John Pawson dans l’un des espaces qui relie deux corps de bâtiments de la maison principale et s’ouvre entièrement sur l’extérieur par une baie vitrée coulissante.© François Halard
Située au cœur des Cotswolds, une région très préservée de la campagne anglaise où de nombreux Londoniens ont aménagé des résidences secondaires, Home Farm, la maison de John et Catherine Pawson, est une ancienne ferme dont certains bâtiments datent du XVIIe siècle. Le cadre est idyllique : avec son petit étang, son verger et les champs qui s’étendent à perte de vue alentour, l’ensemble paraît tout droit sorti d’une peinture XIXe. Seules les grandes ouvertures percées dans les façades laissent deviner que le lieu a été récemment restauré. Achetée par le couple en 2012 pour devenir une maison de week-ends et de vacances, Home Farm a en effet subi d’importantes transformations. Des constructions d’origine, seuls ont été conservés les murs et la toiture, ce qui a permis de libérer d’impressionnants volumes intérieurs éclairés par de larges baies vitrées.

La cuisine-salle à manger a été aménagée dans une grange dont on a gardé toute la hauteur. Le sol est en terrazzo. Au fond, les placards et l’îlot sont en bois d’orme. Autour de la table dessinée par John Pawson, comme la suspension en verre, des chaises Wishbone de Hans Wegner (Carl Hansen). À gauche, une paire de chaises de Donald Judd.© François Halard
Une approche minimaliste
Comme dans tous les projets de John Pawson, architecte qui défend depuis plus de trente ans une approche radicalement minimaliste, le décor est ici réduit à l’essentiel : des murs enduits à la chaux ou habillés de bois, un mobilier spartiate où ses créations pour différentes maisons d’édition voisinent avec quelques pièces iconiques signées Hans Wegner, Poul Kjærholm ou Donald Judd et, surtout, pas d’œuvres d’art. Selon lui, elles attirent l’œil inutilement. Le jardin est plutôt le domaine de Catherine. « Elle a voulu planter des plate-bandes de fleurs autour de la maison. C’est un concept qui m’est complètement étranger ! plaisante-t-il. C’est comme la notion de rideaux. J’ai toujours pensé qu’il fallait laisser les fenêtres nues. Mais je dois reconnaître que le tissu écru en laine bouillie qu’elle a utilisé, façon robe de bure monacale, rend les pièces plus confortables. »

La campagne environnante, au-delà du mur en pierre sèche qui a été construit pour séparer le verger de l’endroit où l’on gare les voitures. Le gravier a été choisi de la même couleur que les pierres du mur et des façades.© François Halard
Proche de la nature
La maison est vaste, très vaste. L’habitation principale, constituée de plusieurs bâtiments reliés entre eux pour créer de belles enfilades, s’étire sur plus de cinquante mètres. En plus des espaces de vie, il comprend quatre chambres et leurs salles de bains attenantes pour accueillir leurs trois enfants, et… trois cuisines. « Il y en a une dans chaque bâtiment : une pour tous les jours, l’autre près du jardin, dans laquelle on peut préparer les repas que l’on prend à l’extérieur, la troisième dans la maison d’invités surnommée The Wain, explique John. Mais si l’on a oublié un ingrédient dans l’une d’elles, il faut retraverser la maison. On fait des kilomètres ! »
Depuis le début du confinement, les Pawson et leur deux fils se sont établis de façon permanente à Home Farm. C’est dans le bureau de Catherine, une pièce aux murs couverts de livres, que John s’est installé pour notre interview par Zoom. Il évoque le changement de vie radical que cette expérience lui a imposé. « Avant, je passais 12 heures par jour au bureau, sans parler des déplacements pour visiter mes différents chantiers. En m’installant ici, j’ai dû évidemment revoir toute mon organisation. Mais ce qui change vraiment, c’est le rythme de vie. Je prends plus de temps pour moi. »
Les journées sont assez structurées, avec de vrais repas pris en famille. Catherine est une bonne cuisinière et le couple a d’ailleurs profité du confinement pour écrire un livre de cuisine, Home Farm Cooking, dont les photos réalisées dans un esprit reportage ont été prises dans la maison. Et puis, il y a les balades quotidiennes. « Nous avons un chien maintenant – une première pour nous – et cela me donne une bonne excuse pour sortir me promener. Pour un “London addict” de mon espèce, cette relation avec la nature est une révélation. Je découvre les bruits de la campagne, les odeurs, j’observe les variations de la lumière et la manière dont elle modifie ma perception du lieu. C’est fascinant. »
Home Farm Cooking de Catherine et John Pawson, aux éditions Phaidon, en anglais, 272 pages, 45 € sur Amazon.